samedi 23 mars 2013

La Révolution française (13) : le danger des divisions...


La pire menace ? La division !

L’ Empereur Joseph ii d’Autriche nous a quittés ce 20 février 1790 dans une tristesse morne. Aussi morne que l’épitaphe qu’il a laissé avant de partir : « Ci-gît Joseph, qui n’a pu réussir en rien ». Cette absence de réussite serait à l’origine de sa santé déclinante, de sa grande tristesse, et de son trépas. A-t-il vraiment tout raté ? Pas forcément, si l’on se place du point de vue des peuples cherchant à sortir de l’oppression. Ce réformateur leur a donné les idées pour cheminer vers le progrès. Son intransigeance bien connue et son manque de respect pour les peuples qu’il dominait ont fini par les faire sortir de leur torpeur et les faire se révolter. Ainsi en particulier aux Pays-Bas Autrichiens qui, depuis la réunion des Etats Généraux de toutes les provinces le 7 janvier 1790, sont devenus les Etats Belgiques Unis.
Unis ? Si seulement... Depuis la libération de Bruxelles, la débandade des troupes autrichiennes qui s’en est suivie et la libération de tout le pays, une crainte se confirme. Cette révolution, qui paraissait bien partie, est en train de pourrir sur place du fait de la division toujours plus profonde entre ses acteurs. Comme on l’a déjà dit, ces derniers se répartissent entre démocrates partisans des réformes votées par une assemblée nationale – les Vonckistes – et les légitimistes, partisans du retour aux anciennes coutumes provinciales, aux Etats et leur division en trois ordres – les Statistes. Ce sont ces derniers qui ont pris le dessus dès l’entrée des vainqueurs à Bruxelles. Les Statistes, emmenés par Van der Noot, se sont appropriés tout le bénéfice de la Révolution, dont les Vonckistes sont pourtant les principaux artisans, et en ont évincé ces derniers. C’est donc sous l’égide des Statistes que les Etats Généraux se sont réunis début janvier et ont adopté, pour les Etats Belgiques Unis, une Constitution à l’Américaine laissant de larges attributions aux provinces et à leurs Etats, et à un Congrès souverain des attributions limitées à l’armée, aux Affaires étrangères et à la frappe des monnaies. Aucun concours de peuple dans cette nouvelle Constitution ! Les Vonckistes sont opposés à ce texte et ne se gênent pas pour le faire savoir. Malheureusement, les Statistes et Van der Noot, bien installés au pouvoir, pourchassent maintenant leurs amis d’hier. Et ils peuvent même s’appuyer sur une bonne partie de la population qui, malgré la volonté générale de se débarrasser de l’Autrichien, se méfie des Vonckistes, vus comme proches des patriotes français, jugés trop anticléricaux par une population encore très attachée au culte. Combien de temps pourra tenir ce nouvel Etat, en proie à un début de guerre civile ?
Cet exemple doit nous faire prendre conscience de la fragilité de l’unité nationale et d’une révolution, de notre Révolution. Car nous ne sommes guère mieux lotis. L’Assemblée Constituante et le monde politique des districts parisiens sont loin de vivre dans la plus grande unité. L’Assemblée est toujours constituée en partie de députés aristocrates déterminés à revenir à l’ancien ordre. Ceux que l’on appelle les Monarchiens, désireux se limiter aux seules conquêtes du 4 août, se sont rapprochés des précédents depuis les événements d’octobre. L’aristocratie, loin d’être abattue, cherche non seulement à faire refluer la Révolution, mais aussi à en protéger le Roi, dont l’enlèvement a déjà été projeté plusieurs fois, Favras étant le dernier en date à y avoir pensé. Les « Constitutionnels », partisans d’une monarchie tempérée par une assemblée législative, sont de loin les plus nombreux, mais divisés eux-mêmes entre modérés et radicaux. Enfin, il y a les plus radicaux, les plus proches du peuple, symbolisés notamment par le district des Cordeliers, qui a dernièrement refusé de livrer « l’Ami du Peuple », Marat, à la garde nationale, venue l’arrêter pour avoir accusé, pourtant fort justement, Necker de « sacrifier le bonheur de la nation aux banquiers ».
Nous ne sommes donc nullement épargnés par les ferments de la division, y compris dans le sein du peuple, dont une bonne partie se passionne pour des pamphlets aristocratiques, ou voit d’un mauvais œil les mesures anticléricales récemment adoptées, comme la mise à la disposition de la nation des biens du clergé, ou l’interdiction des vœux monastiques. Les divisions présentes et futures dues au problème religieux peuvent se révéler dangereuses…






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